Projets d’été : entre relecture, traduction et création
L’été s’est installé, avec sa chaleur, sa lumière particulière, ses silences suspendus, ses heures s’étirant comme une longue journée. Pour beaucoup, c’est la saison du relâchement, du vide bienvenu, du farniente. Pour moi, c’est souvent tout l’inverse : l’été est le cœur palpitant de ma créativité littéraire, le moment où, dans le calme relatif de ces mois plus amples, je peux me plonger sans retenue dans la matière vivante de mes projets.
Et cet été, ils sont nombreux. Presque trop, au regard de ma capacité visuelle qui se dégrade peu à peu. Cela en est toutefois peut-être la raison… Une urgence à livrer ce que j’ai en tête. Une prise en compte de cet « au cas où » suspendu telle une épée de Damoclès. Néanmoins, c’est le même vertige ressenti que les années précédentes, un vertige mêlé d’enthousiasme.
Le travail éditorial : peaufiner le tome 3 du Cycle des Ombres
Mon premier projet – le plus immédiat, le plus exigeant – est celui de la relecture et du travail éditorial sur mon prochain roman, le tome 3 du Cycle des Ombres. Un texte que j’ai porté longtemps, écrit dans une tension constante entre rigueur et lâcher-prise, et que je livre enfin au regard d’Igor, mon correcteur, avec qui je travaille depuis plusieurs années.
Il a ce don rare de lire entre les lignes, de faire remonter à la surface les failles, les maladresses, mais aussi – et surtout – les puissances cachées du texte. Il n’impose rien, mais questionne et me force à chercher l’essence même de ce que je veux transmettre par mes écrits. Il est, en somme, ce miroir sans concession dont tout écrivain a besoin à un moment donné du processus de création d’un ouvrage : celui qui reflète le texte tel qu’il est, et non tel qu’on voudrait le voir.
Reprendre un manuscrit, c’est toujours une expérience déstabilisante. On pense avoir fini, et pourtant, tout recommence. Il faut relire avec un regard neuf, presque étranger. Il faut parfois déconstruire, déranger ce que l’on croyait stable.
On traque la répétition, on redresse la phrase boiteuse, on resserre les dialogues, on ajuste la lumière d’une scène. C’est un travail de précision, d’orfèvrerie. Un travail qui demande du temps, de la patience… et une certaine humilité. Cet été, donc, je me consacre à cette tâche essentielle : faire en sorte que ce roman trouve sa forme définitive, qu’il devienne pleinement lui-même.
La traduction : L’Insane traverse les frontières linguistiques
En parallèle – car mes projets aiment à se chevaucher – se poursuit la traduction en anglais de L’Insane, avec Monica Brain. Traduire, c’est écrire à nouveau, dans une autre langue, une autre musique. Monica est bien plus qu’une simple traductrice : elle est une interprète fidèle mais inspirée, qui cherche à transmettre non seulement les mots, mais aussi les nuances, les silences, les ombres du texte original.
Son travail me fascine. Et il me touche, aussi. C’est voir mon roman prendre vie dans une autre langue, c’est le voir s’éloigner un peu plus de moi, devenir autre, tout en restant le même. C’est une sorte de métamorphose intime, qui me remplit à la fois de joie et d’appréhension.
Nous espérons cette publication en anglais dans le courant de l’été. Ce qui signifie, très concrètement : des échanges réguliers, des allers-retours sur les tournures, les choix lexicaux, les respirations. C’est un travail de collaboration intense, minutieux. Et le temps file.
Oui, cela va être chaud – comme on dit – mais l’enjeu en vaut la peine. L’Insane a une voix, un souffle que je crois capables de franchir les frontières linguistiques. Il fallait lui offrir cette chance.
L’écriture du tome 4 : un nouveau défi créatif
Et puis, au loin, comme encore en suspens, se tient le tome 4 du Cycle des Ombres. Un projet prégnant repoussé plusieurs fois par manque de temps, par crainte aussi, peut-être. J’ai longtemps réprimé mon désir d’écriture et lorsque j’ose enfin, les trois premiers tomes du Cycle des Ombres s’écrivent dans une sorte de frénésie, sans reprendre pourrais-je dire mon souffle.
Je n’avais alors aucune intention de les publier. Le décider finalement m’a propulsée dans une aventure dont je n’imaginais pas même la possibilité. Publier un roman impose un travail dont l’écriture d’un manuscrit n’est que les prémices. Un travail colossal et chronophage dont j’assure ou suis partie prenante de chaque étape.
Ma créativité littéraire en a quelque peu pâti et je me suis depuis contentée d’écrire des chroniques littéraires, des billets pour ce blog et quelques nouvelles. Depuis deux ans, je n’ai pas créé de nouveau roman. Cela me manque.
La trame de ce tome 4 est tissée. Elle m’accompagne depuis de longs mois et cette présence exige à présent d’être déposée, de devenir réalité. J’ai hâte désormais de laisser courir mes doigts sur le clavier et de faire naître cette nouvelle aventure de mon personnage principal, le lieutenant Hugo Scaralèse, car le tome 3, que vous découvrirez l’année prochaine, appelle sa respiration suivante.
Ce premier jet, j’aimerais l’amorcer cet été – si mes yeux me le permettent. C’est un sujet que je n’ai encore jamais évoqué ici, mais mes problèmes de vision compliquent parfois le rapport à l’écran, à la page. Ils m’obligent à ralentir, à interrompre une phrase en plein vol, à reculer devant la fatigue visuelle qui ne prévient pas.
C’est une contrainte que je tente de contourner, d’apprivoiser. Certains jours, elle me semble insurmontable. D’autres, elle devient un simple contretemps. Cet été, j’espère qu’elle se fera discrète, qu’elle me laissera ce champ libre, ne serait-ce qu’un interstice, pour que je puisse faire naître les premières lignes de ce nouveau roman.
Je ne me fixe pas d’objectifs irréalistes. Je ne parle pas de finir. Juste de commencer. D’écrire ces premières pages toujours si fragiles, si hésitantes, mais qui contiennent, déjà, toute la promesse à venir. Si j’y parviens, j’aurai gagné quelque chose. Un élan. Une base. J’aurai gagné la certitude d’avoir la foi nécessaire pour poursuivre cette aventure littéraire.
Écrire en été, c’est écrire autrement. Il y a certes la chaleur à gérer, mais il y a aussi dans la lumière et les nuits plus lentes, une manière différente de penser, de rêver, de bâtir. L’été me procure un état de veille active, de réceptivité. C’est là que, souvent, surgissent les idées les plus inattendues, les phrases les plus justes.
Et si pour écrire j’ai besoin d’ancrage dans la réalité, l’été m’apporte également une certaine liberté. Celle de pouvoir écrire sans culpabilité face aux miens dont le quotidien ne nécessite soudain plus ma constante disponibilité.
Une symphonie créative : l’unité des projets littéraires
Alors oui, l’été s’annonce dense. Entre la relecture avec Igor, la traduction avec Monica, et les prémices du tome 4, les journées seront intenses. Mais ce sont des projets qui me tiennent tous à cœur, qui racontent, chacun à leur manière, un moment de mon parcours d’auteur.
C’est aussi cela que je voulais partager avec vous ici : non pas seulement les projets eux-mêmes, mais le mouvement qu’ils dessinent, la façon dont ils s’articulent, se nourrissent les uns des autres.
Il n’y a pas de cloison étanche entre la correction, la traduction et l’écriture. Ce sont trois temps d’un même geste, trois visages de la création. Corriger un texte, c’est apprendre à mieux l’écrire. Traduire, c’est redécouvrir ce qu’on a écrit. Écrire, enfin, c’est reprendre tous les chemins à l’envers, et tenter d’en ouvrir de nouveaux.
Je vous tiendrai au courant, bien sûr, au fil de l’été. Peut-être viendrai-je ici déposer quelques notes de bord, des échos de ces différents travaux d’écriture, des avancées, des doutes, des petites victoires aussi. En attendant, je vous souhaite à toutes et à tous un été riche de lectures, de découvertes, et – pourquoi pas – d’écriture. Que cet été vous soit agréable.
Au plaisir de recueillir vos réactions.
À très bientôt.